La France perd son statut de grande puissance « pâtissière »
Posté par tokyomonamour le 25 août 2010
Les clichés sont le lot commun des peuples envers les autres peuples. Quelques mots concentrent rapidement et pratiquement (trop, bien sûr) les quelques notions que l’on peut avoir glanées de ci, de là, sur tel ou tel pays.
Quand ont dit « Japon », les occidentaux moyens penseront sûrement « geishas, samouraïs, technologie de pointe et tremblements de terre … ». Pour les japonais, le champ lexical de la France pourrait être le suivant : « cuisine, pâtisserie, produits de luxe et culture ».
Ces raccourcis, pas toujours très précis, sont néanmoins bien utiles pour stocker des connaissances un peu brouillon. Ils sont également révélateurs de la conscience collective d’un peuple, subjective bien entendu, à l’égard d’un autre.
Lorsqu’il y a intégration d’un partie d’une autre culture, sa qualité « étrangère » baisse avec le temps. C’est ce qui s’est passé pour le Judo par exemple : un sport d’origine et d’esprit japonais, qui s’est peu à peu internationalisé pour perdre sa connotation nippone. Le professeur de Judo japonais, qui était tel Dieu descendant sur les terres de Gaulle auparavant, a été remplacé désormais par un professeur français, ou américain ou allemand, moins exotique, mais qui gagne autant de compétitions internationales.
Ce qui s’est passé pour le Judo en France est en train de se passer au Japon pour la pâtisserie. J’effectuais l’autre jour une mission d’interprétariat pour une société française du secteur de la pâtisserie, dont le représentant passait au Japon pour visiter ses importateurs. Lors que celui-ci a proposé de faire un peu d’événementiel en invitant un pâtissier célèbre français pour faire une démonstration, les japonais lui ont dit, de façon abrupte, que c’était inutile. Que cela couterait cher et qu’il y avait d’excellents pâtissiers japonais qui pourraient parfaitement faire l’affaire. Le représentant français, diplomate, pris plutôt bien la chose, mais la question n’est pas là.
Le pâtissier français, comme le cuisiner français d’ailleurs, bénéficiait jusque là d’un statut, d’une aura qui dépassait souvent la nature de ses compétences. Cette aura est en train de s’estomper peu à peu. Elle ne disparaitra pas tout de suite : les jeunes pâtissiers et cuisiniers japonais faisant leurs stages à Lyon ou à Strasbourg pour se perfectionner sont encore très nombreux. Mais il est clair que l’augmentation du nombre de japonais et d’asiatiques gagnant les concours internationaux et la baisse relative du niveau français (je dis relative par rapport à la montée des autres pays ayant intégrer notre culture culinaire) est la preuve que la France est en train de perdre son statut international de soft power culinaire (qui est je le rappelle, est un élément important de puissance indirecte… Le secteur de la restauration étant souvent un vecteur économiques très importants pour les immigrants notamment).
Qui pense à l’origine du Golf, ou du football ? Les éléments culturels évidents, et les intérêts indirects, qu’en retirait le Royaume-Uni ont disparu depuis bien longtemps. Le même phénomène se produit au Japon actuellement pour la France.
Viendra le temps où japonais et chinois dégusteront une tarte tatin ou un gâteau poire amandine en se disant « c’est bon ce truc là, ça vient d’Europe, c’est ça ? »…
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